Focus

L’injection accélère - momentanément - la méthanisation en petits collectifs agricoles

Alors que le biométhane doit représenter 10% de notre consommation de gaz en 2030, il en représente moins de 0,2 % aujourd'hui. L'objectif des 10 % reste-il à notre portée ? A Solagro, nous sommes très prudemment optimistes en raison des retards accumulés tandis que la baisse annoncée des tarifs d'achat de l'énergie peut casser une dynamique très fragile. Certes la filière méthanisation traverse une phase d'accélération, clairement liée aux récents dispositifs de soutiens pour encourager l'injection du biogaz dans le réseau.

Grâce à la mise en place d'un taux de réfaction applicable aux coûts de raccordement aux réseaux de distribution et de transport de gaz naturel, les méthaniseurs n'ont plus besoin d'être à proximité du réseau pour pouvoir injecter à des coûts raisonnables, et il est désormais possible de tirer des canalisations de raccordement sur plusieurs kilomètres.
Le coût n'est plus intégralement supporté par le premier producteur qui demande à se raccorder. Cette réfaction a été une avancée décisive pour la méthanisation agricole et rurale, là où se situe l'essentiel des ressources méthanisables commente Jérémie Priarollo, responsable de l'activité « méthanisation » à Solagro.

« Sur les 30 projets que nous accompagnons en ce moment, une bonne vingtaine au moins vont pouvoir injecter sans difficulté dans le réseau. Pour nous qui défendons l'injection depuis le milieu des années 90, c'est un renversement radical de perspective, comparé à la période où les projets étaient assujettis à l'existence d'un débouché pour la chaleur produite par la cogénération.

Ce desserrement des contraintes ouvre aussi la méthanisation à des projets collectifs de taille plus modeste. Ils réunissent généralement 3 à 6 élevages, et produisent en moyenne 150 Nm3 /heure de biométhane.

Moins lourds et complexes à faire aboutir, ces « petits collectifs » répondent à la demande d'autonomie des agriculteurs en matière d'approvisionnement, à leur volonté d'être le moins possibles dépendants d'apporteurs de substrats extérieurs comme l'ont été certains pionniers. Ils veulent méthaniser en priorité leurs fumiers, leurs lisiers, sans oublier les couverts végétaux d'inter-culture, qui commencent peu à peu à prendre place dans les rotations et dans la ration des digesteurs.

D'ailleurs, le déploiement progressif des couverts d'interculture par les agriculteurs appuie l'émergence d'un modèle de méthanisation plus végétal, alimenté par des résidus de cultures, des grains déclassés, des tontes, des déchets verts, et des couverts, quand ces derniers produisent assez de biomasse pour justifier leur récolte à des fins de méthanisation. La méthanisation agricole n'est ainsi plus réservée aux seuls éleveurs : un nombre sans cesse croissant de céréaliers se lancent dans l'aventure avec des rations exclusivement végétales.

_______________________________________________________________________________________

Légende photo : Projet Agriméthabresse.