"Les fermes de demain" en Aveyron : Dialogue autour de solutions locales pour l’agriculture et l’alimentation du territoire
En Ouest-Aveyron, l’agriculture et l’alimentation sont des sujets intégrés à un projet de territoire, mené avec les acteurs locaux.
Réunis en ateliers, toutes et tous participent ensemble à la recherche de solutions pour faire face aux défis qui impactent tout le secteur agricole, en particulier l’adaptation au changement climatique et les préoccupations socio-économiques d’une agriculture aveyronnaise principalement tournée vers l’élevage.
©Solagro
Un Projet Alimentaire Territorial fédérateur
Depuis 2019, Ouest Aveyron Communauté fédère un ensemble d’acteurs autour d’un Projet Alimentaire Territorial (PAT), afin d’élaborer une politique alimentaire globale, répondant à des enjeux économiques, sociaux, environnementaux et de santé. En binôme avec Sarah Conquet, chargée de mission Alimentation Durable, Jules Bomare Lepape, chargé de mission Transitions des systèmes agricoles et agroalimentaires territoriaux à Ouest Aveyron Communauté coordonne le projet : « Le PAT est un projet transversal, qui comprend des actions sur le foncier agricole et la transmission des exploitations, le recrutement dans les filières de l’agro-alimentaire, l’approvisionnement de la restauration collective en produits locaux et durables, la sensibilisation du consommateur, mais aussi la transformation de la viande pour les circuits-courts, ou encore l’accès des plus démunis à une alimentation de qualité. À nous de trouver les solutions qui correspondent le mieux à notre territoire et à ce que nous souhaitons en faire. »
Pour accompagner ce projet, Solagro et Ecozept ont effectué un diagnostic de territoire chiffré, analysant les tendances d’évolutions actuelles pour ensuite établir des scénarios de prospective sur l‘avenir agricole et alimentaire du territoire. Des ateliers ont été organisés pour débattre de ces propositions avec les acteurs locaux :
agriculteurs, associations, interprofessions, chambre d’agriculture, société d’aménagement foncier et d’établissement rural, lycées agricoles professionnels, citoyens, élus,…
À l’évocation des problématiques rencontrées, de nombreuses idées ont émergé, notamment pour répondre au besoin de renouvellement de générations d’agriculteurs, trouver des repreneurs et transmettre les fermes.
Amandine Delbès, administratrice de l’APABA – le GAB de l’Aveyron - et éleveuse bio a rappelé le rôle essentiel des structures d’État et leur responsabilité dans la répartition des autorisations d’agrandir et d’exploiter pour que l’agriculture défendue soit à l’image du territoire et de l’alimentation souhaitée.
Les labels de qualité peuvent eux aussi permettre de changer les élevages localement. « L’Interprofession Régionale du Veau d'Aveyron et du Ségala impose par exemple dans ses cahiers des charges un minimum de 80% d’autonomie fourragère pour les élevages, une obligation de pâturer au moins 180 jours en extérieur, pour limiter à la fois les intrants et les coûts », explique Aurélie Fayel, chargée de mission pour ce label.
©CielBleu pour l'IRVA
Des paiements pour les services rendus par les agriculteurs·rices
Ceux des agriculteurs d’Aveyron qui pratiquent une agriculture non-intensive participent à la préservation des paysages, à l’attraction touristique du territoire, et, avec l’entretien des parcelles, à la lutte contre les incendies. Tous ces services rendus pourraient être rétribués.
Des paiements pour services environnementaux (PSE) existent déjà en France et permettent de valoriser les pratiques agricoles contribuant à restaurer ou maintenir des écosystèmes dont la société tire des bénéfices (préservation de la qualité de l’eau, stockage de carbone, protection du paysage et de la biodiversité…). Ils pourraient être généralisés et étendus en Ouest Aveyron.
La mobilisation du foncier peut permettre de constituer une barrière contre les incendies. Il existe par exemple des Associations Foncières Pastorales (AFP), notamment dans le territoire voici des Causses du Quercy. Ces structures permettent de rassembler des propriétaires de parcelles forestières pour répondre à un double objectif : respecter les obligations légales de débroussaillement de ces parcelles en mettant à disposition leurs parcelles pour le pâturage d’ovins ou de caprins. Les agriculteurs sont locataires des parcelles qu’ils utilisent, ce qui permet à des jeunes de limiter les investissements pour pouvoir s’installer
Porté par la Chambre d’Agriculture de l’Aveyron, le Label « Bienvenue à la ferme » sur le site agritourisme permet quant-à-lui de faire le lien entre des exploitations et une activité de tourisme. Un modèle économique complémentaire nouveau, plébiscité par Julien Hugonenc, éleveur en Aveyron, pourrait être trouvé.
L’installation en collectif
Pour l‘installation des jeunes agriculteurs, l’absence de capitaux, la complexité des métiers techniques et la difficulté de vendre les produits à leur juste valeur, même dans les filières de qualité, sont autant de sujets qui ont animé les discussions et pour lesquels le passage d’un modèle de transmission familiale des exploitations à un modèle plus collectif semble proposer de nombreux avantages.
Il donne aux nouvelles générations la possibilité d’intégrer une structure existante, sans investir de capitaux et de bénéficier d’un salaire immédiatement. S’associer peut permettre aussi de bénéficier de plus temps libre, avec une répartition possible du temps de travail. Le collectif peut permettre également de mutualiser les outils et d’intégrer des ateliers de transformation des produits, en intégrant de nouvelles compétences et sources de revenus en diminuant les intermédiaires.
Corinne Brigitte, directrice du lycée Beauregard, basé à Villefranche, explique comment l’établissement agricole public a développé un atelier de découpe de produits carnés et de transformation de fruits et légumes en jus, compotes, confitures, coulis, conserves... Cet atelier à vocation pédagogique permet également à des agriculteurs d’expérimenter des recettes et pourquoi pas, leur donner envie d’intégrer l’étape de transformation des produits dans leurs exploitations pour profiter de ses plus-values.
De l’avis de tous, les ateliers de transformation apparaissent comme un maillon essentiel pour assurer le tissu économique et social du territoire. En Aveyron, comme dans toutes les zones d’élevage, la viabilité des abattoirs est liée à celle des « Fermes d’élevage de demain ».