Focus

Évolution des pesticides en France métropolitaine et en outre-mer

La carte Adonis, qui cartographie l’intensité d’usage des pesticides en France par commune, a été mise à jour. En plus des données actualisées sur l’ensemble du territoire métropolitain, qui permet une comparaison des résultats sur trois ans, elle s’étend désormais aux départements et régions d’Outre-mer. 

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Un constat d’échec pour la réduction de l’usage de pesticides

L’objectif du plan Ecophyto porté par la France en 2007, de réduire de 50% l’usage des pesticides en France en l’espace d’une décennie, est loin d’être atteint. Le NODU, indicateur de suivi calculé à partir des ventes de pesticides, a augmenté en moyenne de 3% entre 2009 et 2022*.
Les équipes de Solagro viennent d’ajouter à ces données celles de la carte Adonis, permettant de comparer l’évolution de la fréquence de traitement pesticides, herbicides et les surfaces en bio entre 2020 et 2022. En trois ans, l’Indice de fréquence de traitement (IFT) moyen national mesuré dans Adonis ne baisse toujours pas et passe de 2,36 à 2,37 ; même si elle enregistre une légère augmentation de surfaces cultivées en agriculture biologique (+1,1%).

Evolution des IFT par commune Adonis

*https://www.generations-futures.fr/actualites/indicateur-ecophyto/

En 2022, dix cultures concentrent 90% des traitements en France et parmi elles, quatre représentent 67% de l’utilisation de pesticides : le blé tendre, le colza, l’orge et la vigne. Le blé tendre représente à lui seul 36% de la fréquence de traitement nationale.

IFT 10 cultures Adonis Solagro

Des disparités locales et culturales

Les moyennes nationales masquent des évolutions contrastées selon les départements et les cultures. Certains départements voient leur IFT baisser de plus de 10% (Côte-d’Or, Haute-Marne, Meuse, Dordogne, Lot-et-Garonne, Alpes-Maritimes, Lozère et Corse du Sud) quand d’autres augmentent de plus de 10% (l’Indre, le Cher, l’Indre-et-Loire et le Cantal).
On assiste quand-même à une augmentation de la part des surfaces en bio dans la SAU sur la quasi-totalité des départements et en particulier une hausse de plus 5% observée en Gironde et dans le Gard.

Concernant les cultures, la plupart des IFT restent stables entre les enquêtes « Pratiques culturales » de 2017 et de 2021. Cependant, il est observé une baisse des IFT moyens du soja, du lin oléagineux, de la féverole, du tournesol et du pois qui ont été réduits (de -22% à -7%) tandis que les IFT de la pomme de terre et de la betterave ont augmenté respectivement de 18% et 22%.

Visionnez les résultats par département et par culture                                              

Notre empreinte pesticides 

Nos productions animales ont également un impact qui n’apparaît pas sur cette carte. Il a été estimé que le soja importé pour nourrir les animaux représente 18 millions d’IFT global soit 3 fois plus que nos productions intérieures d’orge, de colza ou de vin. Cette empreinte pesticides qui n’apparaît pas sur la carte Adonis pèse lourd, particulièrement au Brésil d’où provient la majorité du soja que nous importons.
Des outils existent pour que chaque consommateur puisse évaluer l’empreinte pesticides de son alimentation à partir de ses achats : https://www.empreinte-pesticides.com/ 

 

L’agroécologie comme alternative

L’agroécologie apparaît comme une solution éprouvée comme alternative aux pesticides. Les solutions fondées sur la nature, pour la nature, concourent non seulement à la protection de la biodiversité, des sols et des paysages mais aussi à une meilleure résilience et adaptation aux phénomènes de dérèglement climatique. De nombreux témoignages d’agriculteurs et agricultrices engagé·es en faveur de ces transitions attestent de la pérennité de ces solutions.

La transition agroécologique est possible si nous réunissons les conditions économiques pour le faire et permettons aux agriculteurs·rices de vivre dignement de leur métier.

Les agriculteurs et agricultrices qui l’ont expérimenté en attestent, la réduction de l’usage des pesticides répond à la fois un enjeu de préservation de notre environnement et de notre santé mais aussi d’adaptation au changement climatique des exploitations.

La plateforme OSAE - Osez l'agroécologie, développée par Solagro, regroupe des témoignages inspirants : 

Voir le témoignage de Sophie Deffis et Laurent Bonin, de l’EARL des Frênes dans les Hautes-Pyrénées

Voir le témoignage de Benoît Rozière et Caroline Carette, de la ferme de la Borie Alte en Aveyron

​L’agroécologie vise à rendre les systèmes plus robustes et à renforcer leur résilience. Les pesticides de synthèse réduisent voire annihilent l’activité biologique naturelle et nécessaire. Il est essentiel de sortir des pesticides pour restaurer les services suivants : recycler les éléments nutritifs, reconstituer la fertilité des sols, fixer le carbone et l’azote de l’air, réguler les populations de ravageurs, augmenter les pollinisateurs sauvages...

L’enjeu est économique, sur le long terme, mais également à court terme pour les agriculteurs qui ont dépensé en 2022, 2,8 milliards d’euros en achat de pesticides soit 5% des consommations intermédiaires.

 

 

Des données pour l’outre-mer !

Le travail des équipes d’ingénieur·es de Solagro a permis d’intégrer à cette carte les données sur les cultures de Guadeloupe, Martinique, Guyane, La Réunion, Mayotte.

 

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Zoom sur la canne à sucre 

La carte Adonis dans les territoires ultramarins montre que la culture de la canne-à-sucre à un fort impact, notamment sur l’usage d’herbicides. Avec une fréquence totale de traitement de la canne-à-sucre de 88 000 ha (IFT moyen x surface cultivée), cette graminée représente 53% de tous les traitements pesticides réalisés dans les territoires d’Outre-mer étudiés. La canne-à-sucre occupe 36 000 ha en France, soit 30% de la surface agricole cultivée des territoires ultramarins, dont plus de la moitié sur l’île de La Réunion et plus d’un tiers en Guadeloupe.

L’utilisation d’herbicides est particulièrement élevée sur une grande partie des zones littorales de La Réunion. Les molécules utilisées pour désherber et leurs métabolites contaminent l’environnement (eau) et les autorisations d’usage sont progressivement retirées (comme le S-métolachlore dont l’usage est interdit depuis avril 2024). L’enjeu est donc de taille pour la filière canne-à-sucre qui doit poursuivre la mise en œuvre de pratiques alternatives au désherbage chimique pour diminuer la pression globale des pesticides.

 

Zoom sur la banane

La Martinique et la Guadeloupe ont subi pendant 20 ans l’usage du chlordécone, insecticide utilisé pour lutter contre le charançon du bananier de 1972 à 1993 aux Antilles. Pendant ces vingt années d’utilisation, cet insecticide a entrainé une pollution des sols, des eaux douces et du milieu marin. Depuis, de nombreux progrès ont été faits sur les pratiques d’usage des pesticides sur la banane, notamment avec la mise en place du Plan Banane Durable. Ces améliorations de pratiques sont visibles en Guadeloupe avec une baisse de plus de 50% des IFT depuis 2012 (passant de 6,74 à 3,2) , à la différence de la Martinique où l’IFT total de la banane est resté élevé, autour de7,3 en moyenne depuis 2012. Malgré des progrès notables depuis le début des années 2000, la banane reste une des cultures les plus traitées dans les départements et régions d’outre-mer, avec seulement 4% de bananeraies en bio en France en 2022.

Les systèmes agricoles dominants agroforestiers et vivriers de Mayotte et de Guyane permettent à ces deux départements d’enregistrer un usage réduit des pesticides.

L'exemple d'une culture de vanille sans pesticides

Sur la plateforme OSAÉ – osez-agroecologie.org, Quentin Donnay, qui cultive la vanille en sous-bois, et Arthur Herbreteau, chargé de mission agro-environnement pour le Parc national de La Réunion apportent leur témoignage de mise en place de pratiques agroécologiques et de protection dess écosystèmes.

Quentin Donnay Vanille Réunion OSAE Solagro.        Arthur Herbreteau Vanille Réunion OSAE Solagro

Visionnez le témoignage OSAÉ d’Arthur Herbreteau et Quentin Donnay à l’Île de La Réunion