Focus

Agrivoltaïsme : évolution du cadre pour le développement des projets

Un co-usage agricole et énergétique des terres est possible

L'objectif de l'agrivoltaïsme n'est pas de soustraire des terres agricoles de leur vocation première de production alimentaire mais bien au contraire de faire co-exister les deux activités de production alimentaire et énergétique en synergie sur une même parcelle. Beaucoup de terres sont délaissées ou abandonnées par l'agriculture, avec de multiples raisons socio-économiques, et les parcs au sol peuvent permettre de leur redonner un usage agricole sur du long terme, en sécurisant le foncier avec un éleveur par exemple.

De nombreuses études et retours d'expériences suivis par Solagro attestent des co-bénéfices des activités agricoles et photovoltaïques sur les mêmes terres, sous réserve que les projets respectent un certain nombre de règles dès leur conception.

Retrouvez le témoignage de Sabine Leray, éleveuse
qui utilise un parc photovoltaïque pour faire pâturer son cheptel ovin.

Retrouvez les fiches synthèses des travaux menés sur les parcs Arkolia Énergies

De nouvelles procédures de la Commission de Régulation de l'Énergie pour le développement du photovoltaïque en agriculture

Rappel du contexte

Le développement des énergies renouvelables sur le territoire passe par un mix énergétique qui intègre le photovoltaïque. Les appels d'offre de la Commission de Régulation de l'Énergie (CRE) font partie des dispositifs mis en place pour développer ces énergies renouvelables, en garantissant un prix plancher de l'électricité au producteur. Les cahiers de charges sont spécifiques à chaque appel d'offre, avec des conditions d'éligibilité à respecter.

Le mécanisme de garantie de prix permet aux opérateurs de monter leur business plan, nécessaire à la réalisation de leur projet. En revanche, si le prix du marché de l'électricité est supérieur, c'est l'opérateur qui paye la CRE et l'État, permettant de financer le bouclier tarifaire des énergies fossiles. C'est ce qui s'est produit en  2022 avec l'envolée des prix des énergies fossiles, conséquence de la guerre en Ukraine.

Élargissement du périmètre

Jusqu'à présent, les projets photovoltaïques sur des terres agricoles n'étaient pas éligibles en dehors de l'appel d'offre CRE « Photovoltaïque innovant ». En octobre dernier, la Commission a ouvert l'appel d'offre "Photovoltaïque centrales au sol » pour des projets sur des terres agricoles, rendant ainsi éligibles les projets sur « jachères et systèmes d'élevage ».

En novembre, un appel d'offre « Photovoltaïque bâtiments » a été ouvert aux ombrières mobiles sur terres agricoles. Ce dernier était auparavant limité aux bâtiments (dont les nombreux hangars agricoles photovoltaïques) et aux serres agricoles photovoltaïques.

En dehors de ces appels d'offre, les projets agricoles pouvaient aussi bénéficier des tarifs d'achat pour les installations de moins de 250 kWc, plafond relevé à 500 kWc en 2022.

 

Des obligations pour encadrer les projets

Reprenant le cadre de l'appel d'offre CRE innovation, les nouveaux cahiers des charges de la CRE "Photovoltaïque centrales au sol et bâtiments / ombrières mobiles et serres" obligent en particulier à argumenter les services rendus à l'agriculture et à mettre en place un suivi agricole effectué par un organisme compétent, a minima tous les 3 ans. Ce suivi permet une remontée d'informations dans les bases de données nationales et une évaluation de la production agricole par rapport au prévisionnel, avec une analyse des écarts. L'évaluation intègre aussi un suivi d'impact environnemental et de préservation de la biodiversité. L'écopâturage extensif peut permettre par exemple de conforter la biodiversité à l'échelle locale et d'éviter l'enfrichement de certaines terres.

Tout projet doit également recueillir un avis de la Commission Départementale Protection des Espaces Naturels, Agricoles et Forestiers (CDPENAF). Il s'agit là d'un maillon essentiel pour que chacun soit étudié précisément au cas par cas, en tenant compte de son ancrage local. Il importe que la CDPENAF distingue les projets d'agrivoltaïsme des autres projets locaux consommateurs nets de terres agricoles. À l'inverse des constructions d'autoroutes ou de zones d'activités, l'agrivoltaïsme ne détourne pas les terres de leur usage principal mais contribue, par la co-activité, à maintenir une production agricole parfois menacée.

Pour fixer le cadre légal, le projet de loi sur l'accélération du développement des énergies renouvelables, après discussions et amendements au sénat puis à l'assemblée nationale, poursuit sa route, avec quelques points de blocages. Il devait notamment clarifier la place à donner au volet agricole et la définition de l'agrivoltaïsme. À ce jour, avec les dernières modifications apportées par l'Assemblée, le projet de loi reste assez restrictif et impose de nombreuses contraintes, ce qui augmente les freins au développement de l'agrivoltaïsme.

Enfin, des décrets ministériels devront déterminer les conditions de déploiement et d'encadrement des projets pour rendre la loi applicable.

Voir le projet de loi